6 textes ont paru en novembre 2010 dans la revue littéraire n°13 "Ici et là" publiée par la maison de la poésie de St Quentin en Yvelines dont celui-ci.

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Recueil de textes personnels publié en 2010 dont est issu le texte "Fonte" plus bas, paru aussi en revue. En vente (6€) à "Plein ciel", "La Galerne" (Le Havre), la librairie d'Honfleur, le "Bateau-livre" (Lille), "Les Danaïdes" (Aix-les-Bains) ainsi qu'auprès d'Alain Chapelain.

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DOUCEUR (septembre 2008)
Elle me dit: «à très bientôt!».
Je laisse se confondre avec la douceur de la nuit, celle de son mensonge.
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GRACE (2000) - texte paru dans la revue littéraire "à l'index" n°12-13, direction : J.C. Tardif
J'ai sur moi l'image de la grâce tant vénérée. Pour peu qu'elle puisse être représentée, prise en flagrant délit d'apparition, grisée par tant d'adoration supposée.
Je l'ai eu parfois devant moi, à mes côtés, j'ai eu cette chance. Je l'ai fréquentée. J'ai fini par l'embrasser, l'étreindre, la caresser. J'ai osé, blasphémé là où je n'aurais dû que regarder, admirer religieusement dans un coin de silence.
Disons que je possède le reflet d'un instant de grâce qui se balade avec moi maintenant sur papier glacé, paradoxalement en toute liberté. Cela est plus conforme à la réalité de décrire les choses ainsi. On ne vit que des instants de grâce, intensément en le soupçonnant à peine. Avec un rien de vague à l'âme, de la culpabilité transie de l'emprunteur qui se devine privilégié, en sursis. Lourd statut en somme.
Des secondes sculptées dans l'ébène, dont le grain sera éparpillé puis englouti par la spirale du temps. Cela concourt à son charme, cela est son charme. Celle-ci, nymphe intouchable, ne saurait être figée, atteinte, apprivoisée, tout juste approchée. L'inverse serait impropre à son essence, à son évanescence première à laquelle nous assistons spectateurs impuissants, incrédules et émerveillés.
Laissons faire la grâce, laissons-la filer et hanter le rouet de notre mémoire. Il n'y a rien d'autre à faire, je le crains. Au mieux, elle deviendra à son insu, égérie.
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FONTE - Publié dans la revue "A l'index" (octobre 2007)
Quand elle s'est assise à côté à la table de jeux, la petite pile de jetons fondait. Quelques instants plus tard, le niveau initial était dépassé.
Après quoi courrons-nous si ce n'est à la suite de ces petits miracles, ces parfums de grâce échappés qui nous transportent et nous remettent d'aplomb, ressuscités ! Plus, serait tenter le diable !
Par sa présence, j'avais redécouvert ne serait-ce par souci de légèreté et de dérision, ce sourire, trompe-la-mort poli, mascara des abîmes. Une prime.
L'éventuelle chute des petites pièces de plastique ne me préoccupait plus. Seule intervenait la vision d'une épaule, d'une silhouette esquissée. Le souhait également que cet instant ne fonde pas trop vite lui non plus.
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"Celui qui, disant les choses, à demi, me permettra de greffer mon rêve sur le sien(...)" (Debussy)
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Texte primé (1er prix catégorie "poèmes") dans le cadre de "lire en fête" au Havre (2007).
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DANSE (2000)
Je vois les feux arrières de la voiture qui s'éloigne vers le rond-point pour le lécher puis s'évaporer à tout jamais vers le nord. Tapis fuyant. Je ne reverrai jamais ce véhicule ni son possesseur. Comme un pressentiment déjà en t'embrassant, en te regardant dans l'éclat blême du plafonnier puis en claquant la porte: "et si cette fois, c'était la dernière?" Tu étais arrivée l'avant-veille dans la lueur exaltée de midi, précédée de ta blondeur, superbe comme d'habitude; à faire peur. A damner dit-on de coutume. Rayon trop pesant qui s'immisce. On peut avoir du mal à se prêter à cette présence irradiante qui écrase, consume de l'intérieur toujours plus et longtemps après encore. Dont on cherche naïvement et en pure perte à se protéger d'un revers de la main ou de la tête. Qui éloigne en final envers et contre tout. Tu t'es éclipsée dans la nuit évoquée de cette fin d'été telle une danseuse étoile sur ses pointes, as glissé vers les coulisses lorsque j'ai tangué. Parenthèse de vie, rideau! Tu tournes maintenant comme une perdue entre les parois trop étroites de mon esprit dans lesquelles tu cognes invariablement. Tu valses ad libitum avec des fragments de moi-même sur un tempo dont toi seule as choisi la mesure, en conductrice.
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Extrait (dernière partie) de "LES CORDES" - publié à l'automne 2007 et dans le recueil "Elément féminin"
Le ruban, vestige nocturne, est resté symboliquement accroché à la grille de l'accordéon, offert aux vents de l'instrument. Il vibre dans les trous d'air occasionnés par les touches disparaissant sous les doigts. La nature supporte mal le vide, dit-on.
Parfois, le son naît de cordes, de peaux pincées, frottées mais toujours pressées. La caisse de résonnance, le porte-parole changent, seuls restent l'absence, des instants, ces rendez-vous manqués d'escrocs que l'on attend pourtant.
L'on en dit si peu, on en laisse s'évader tellement.
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CHALEUR (2006)
Elle dit: « je n'aime pas les gens qui ne donnent pas ! ». Peut-être est-ce pour cette raison qu'entre deux bancs de pudeur, quelques coussins de crainte, un petit tas de courriers nommément appréciés, elle ne prenait de nouvelles ni n'en donnait. C'eut été contre courant, juste quelques mots et instants qui près d'un âtre fortuit, auraient suscité l'échange et même porté. Juste cela. Très loin de déclarations et du virus de l'indifférence quant à lui trop propagé auquel il ne faille rien céder. Humaine, trop humaine.
"Ce monde où ne s'offrent à nous que bien rarement la chance et la douleur d'un dialogue véritable." (in "Le livre à venir" - M. Blanchot)
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